Quelle fiscalité pour les déficits fonciers ?

Quand vous investissez dans l’immobilier locatif, votre but premier est souvent de générer des revenus. Lorsqu’il s’agit d’une location nue, vos revenus locatifs seront fiscalement considérés comme des revenus fonciers (par opposition aux revenus BIC pour les locations meublées et locations saisonnières). Les revenus fonciers répondent à des règles fiscales spécifiques, dont la possibilité de déduire une partie de vos déficits sur une partie de vos autres revenus imposables. 

Investir dans l’immobilier pour générer des déficits ? Cela peut paraître contre-productif, pour autant nous verrons que dans certains cas, cela peut être une véritable opportunité financière !

Qu’est-ce qu’un déficit foncier ?

L’exploitation d’un bien immobilier à des fins locatives génère de nombreux frais qu’il faut mettre en balance avec les revenus locatifs. Si les charges sont supérieures aux recettes, on parlera de déficit foncier. Le traitement fiscal du déficit suit un régime particulier puisqu’il permet, dans une certaine mesure, de déduire une partie de ce déficit sur vos autres sources de revenus imposables.

Il s’agit d’ailleurs de l’un des nombreux avantages de l’investissement locatif dans l’ancien.

Ceci étant, il faudra s’orienter vers le bon régime fiscal pour pouvoir réaliser un déficit foncier.

Déficit foncier : micro foncier ou régime réel ?

L’un des prérequis pour générer un déficit foncier est d’opter pour le régime réel. Ce régime permet de déduire les charges d’exploitation et certains travaux de vos revenus fonciers (nous y reviendrons). Pour faire simple, si vos charges sont supérieures à vos revenus, vous dégagez un déficit foncier.

A contrario, le régime micro foncier n’est pas du tout adapté pour générer des déficits fonciers puisque ce régime ne prend pas en compte vos charges réelles. À titre de rappel, vous pouvez seulement déduire de vos recettes un montant forfaitaire de 30 %.


Lire aussi : La fiscalité des revenus locatifs d’une location nue : micro foncier ou régime réel ?

Le principe de déduction fiscale des déficits fonciers

Dès lors que vous dégagez des déficits fonciers en louant un bien immobilier, ces derniers peuvent s’imputer sur vos autres revenus fonciers.

Cependant, le montant du déficit foncier déductible est plafonné à 10 700 euros par an. L’excédent de déficits fonciers (la part du déficit supérieure à 10 700 euros) peut néanmoins être reporté pendant 10 ans sur vos seuls revenus fonciers. 

Si votre revenu global est insuffisant pour absorber la déduction de 10 700 euros la première année (ce qui est rare dans la pratique), vous pouvez la reporter pendant 6 ans sur votre revenu global.

Exemple : Vous réalisez des travaux de rénovation pendant la première année générant 60 000 euros de déficits fonciers en raison de travaux d’entretien et de réparation. Vous pourrez répartir le déficit sur vos revenus fonciers et revenus globaux de la manière suivante :

  • 10 700 euros la première année sur le revenu global ;
  • 49 300 euros à déduire de vos revenus fonciers pendant les 10 prochaines années.

La possibilité de report n’est donc pas à négliger dans votre stratégie d’investissement puisqu’ils conduisent à défiscaliser vos loyers. Comme nous le verrons, les déficits fonciers sont parfois la meilleure possibilité de défiscalisation possible surtout si vous avez multiplié les investissements locatifs !

Remarque : Vous pouvez dans le cadre de la Loi Cosse signer une convention « louer mieux » avec l’ANAH (agence nationale de l’habitat). Ainsi, en contrepartie d’un loyer réduit, vous pouvez notamment bénéficier d’un déficit foncier déductible du revenu global de 15 300 euros (au lieu de 10 700 euros).

Comment générer et calculer un déficit foncier ?

Pour générer un déficit foncier, il faut que vos charges soient supérieures à vos recettes locatives. Ceci étant, toutes les charges ne sont pas déductibles et certaines sont prises en compte pour la seule catégorie revenus fonciers. 

Les charges déductibles du revenu foncier

Toutes les charges ne sont pas admises en déduction des revenus fonciers (sinon ce serait trop simple…). Globalement vous pouvez déduire toutes les charges afférentes à l’exploitation du bien immobilier soit :

  • les intérêts d’emprunt (attention, comme nous le verrons, les intérêts d’emprunt ne sont pas déductibles des revenus globaux, seulement des revenus fonciers)
  • les frais d’assurance (emprunt immobilier, assurance loyers impayés, assurance habitation du propriétaire…)
  • les frais de gestion locative (si vous avez confié votre logement à une agence immobilière)
  • impôt et taxe (taxe foncière, taxe d’habitation si supportée par le propriétaire)
  • les charges de copropriété non répercutées sur le locataire

Théoriquement, l’ensemble de ces charges ne devrait pas générer de déficit foncier significatif surtout en période de taux immobilier bas.

C’est pourquoi la plupart des déficits fonciers se génèrent au moyen de travaux, mais pas n’importe lesquels. En effet, les travaux d’agrandissement, de construction, et de reconstruction ne sont pas déductibles fiscalement au titre des déficits fonciers.

Par contre, vous pourrez déduire vos travaux de rénovation, de réparation et d’entretien du bien immobilier. Ces derniers peuvent représenter un montant important pour générer des déficits fonciers.

Attention cependant, acheter une vieille maison ou un appartement à des fins de rénovation nécessite des compétences en bâtiment et en gestion immobilière. Si vous souhaitez maximiser vos rendements et éviter les impondérables, nous vous recommandons de vous orienter vers l’investissement locatif clé en main ou vers une SCPI de déficit foncier (SCPI fiscale) ! 

La déduction des intérêts d’emprunt au titre des déficits fonciers

Pour rendre les choses compliquées, les intérêts d’emprunt sont déductibles des revenus fonciers, mais pas sur le revenu global. Il est donc impossible d’imputer les intérêts d’emprunt sur vos autres revenus dans le cadre d’un déficit foncier.

Alors, comment déterminer la part des déficits fonciers imputables ?

Les intérêts d’emprunt sont toujours déduits en premier de vos revenus locatifs (avant les autres charges) de sorte que :

  • si le résultat est négatif, il ne faudra pas prendre en compte les intérêts d’emprunt (vous pourrez par contre déduire vos autres charges). Ils seront néanmoins reportables sur vos revenus fonciers pendant 10 ans. Cette situation est très rare en théorie.
  • si le résultat est positif, pas de difficultés : vous pouvez déduire vos autres charges. Le surplus négatif est déductible de vos autres revenus au titre des déficits fonciers. 

Allez, un petit exemple pour mieux comprendre. 

Exemple : Vos revenus locatifs sont de 1 000 euros en 2020. Or, vos charges d’intérêts sont de 1 200 euros et vos autres charges de 3 000 euros.

Les intérêts d’emprunt se déduisent en premier : 1 000 - 1 200 =  - 200 euros

Les intérêts ne sont pas déductibles du revenu global, donc votre déficit foncier déductible est de 3 000 euros au lieu de 3 200 euros.

L’année suivante, vous pourrez déduire 200 euros (les intérêts d’emprunt non déduit) de vos revenus fonciers.

Quels sont les travaux déductibles au titre des déficits fonciers ?

Tous les types de travaux ne sont pas déductibles de vos revenus fonciers et, par conséquent, ne peuvent générer des déficits fonciers.

En somme, seulement deux types de travaux peuvent générer des déficits fonciers :

  • les travaux de réparation et d’entretien. Il s’agit des travaux engagés dans le but de maintenir ou de remettre un immeuble en bon état sans en modifier la consistance, l’agencement ou l’équipement initial ;
  • les travaux d’amélioration. Ces derniers ont pour but d’apporter au bien immobilier un nouvel élément de confort sans pour autant modifier la structure de l’immeuble.

A contrario, les travaux de construction, de reconstruction ou d’agrandissement ne sont pas considérés comme déductibles des revenus fonciers. Ces travaux regroupent principalement les travaux de gros œuvres. 

Ainsi, si vous envisagez un investissement locatif assorti de travaux de rénovation (impliquant des travaux de toutes natures), il est fort probable que vous ne puissiez pas déduire la totalité du prix de vos revenus fonciers. Il faudra alors bien prendre soin de séparer les factures ouvrant droit à déduction de celles qui ne sont pas déductibles.

Pour vous aider, voici un petit tableau récapitulatif. 

Type de travaux Exemple Déductibles au titre des déficits fonciers ?
Travaux d’entretien et de réparation réfection d’une façade mise aux normes de l’installation électrique remise à neuf des évacuations d’eaux usées remplacement du système de chauffage Oui
Travaux d’amélioration travaux d’isolation thermique achat et installation de fenêtre à double vitrage Travaux d’amélioration de la performance énergétique Installation d’une nouvelle cuisine Oui
Travaux de construction, de reconstruction ou d’agrandissement démolition d’un mur démolition de toiture en vue d’effectuer une surélévation Non

Lire aussi : Quels sont les travaux déductibles des revenus fonciers ?

Travaux déductibles : arbitrage entre plus-value ou déficit foncier

Si vous souhaitez générer des déficits fonciers avec des travaux, il faudra effectuer un arbitrage fiscal. En effet, certains travaux de rénovation (amélioration et entretien) peuvent au choix :

  • venir augmenter le prix d’acquisition pour réduire l’assiette de la plus-value immobilière
  • être déduit au titre des déficits fonciers.

En d’autres termes, si vous décidez de déduire vos travaux au titre des déficits fonciers, vous ne pourrez pas les déduire au titre de la plus-value. Pour votre gouverne et d’une manière générale, il est quasiment impossible en droit français de déduire fiscalement deux fois une même dépense (si on vous propose l’inverse, faites quelques recherches ;) ).

Pour choisir l’une de ces solutions, il faudra prendre en compte le montant des travaux pour voir s’ils ne viennent pas en saturation de vos revenus fonciers pendant 10 ans.

Il faudra aussi tenir compte de vos revenus, de votre tranche marginale de l’impôt et de votre potentiel de plus-value (difficilement anticipable). En effet, l’impôt sur les plus-values immobilières est un taux forfaitaire de 19 % auquel on ajoute 17,2 % de prélèvements sociaux après application d’un abattement pour durée de détention. 

Ceci étant, plus vous envisagez de détenir votre bien locatif sur une longue durée, plus il sera préférable de déduire les travaux en déficit foncier. 

Aussi, même pour une détention à court terme, si vos revenus fonciers sont imposables dans une TMI (tranche marginale de l’impôt) supérieure à 30 %, il sera souvent préférable d’opter pour les déficits fonciers.

Déficit foncier : l’obligation de louer votre bien pendant 3 ans

Vous voilà au point sur la stratégie à adopter avec les déficits fonciers, reste à voir la contrepartie de cet avantage fiscal.

Notre cher Code général des impôts subordonne le droit d’imputer les déficits fonciers sur votre revenu global à condition que vous vous engagiez à louer pendant au moins 3 ans le logement (source du déficit).

Si vous ne respectez pas votre engagement, l’administration fiscale recalculera vos impôts en supprimant l’avantage obtenu.

Exemple de calcul de déficit foncier

Pour couronner toutes ces explications, reprenons du début avec un exemple de calcul de déficit foncier. Nous allons supposer que vous n’êtes pas à votre premier coup d’essai en immobilier et que vous disposez de 2 biens locatifs. 

Votre bénéfice foncier est de 14 400 €. Étant au régime réel, chaque année vous déclarez la somme de 14 400 €.

Vous êtes en train d’en acquérir un 3e bien locatif avec la ferme intention de réaliser des travaux de rénovation pour un montant déductible de 45 000 euros. Vous pensez pouvoir percevoir un loyer de 15 000 euros / an. On estime les charges et taxes à hauteur de 3 000 euros / an et intérêt d’emprunt à 600 euros / an. 

  Bien locatif n°1 Bien locatif n°2 Bien locatif n°3
Revenus locatifs 10 000 € 9 000 € 15 000 €
Charge et taxe - 2 000 € - 1 700 € - 3 000 €
Intérêt d’emprunt -500€ -400€ -600€
Travaux déductibles 0 0 - 45 000 €
Bénéfices ou déficit 7 500 € 6 900 € - 33 600 €

Quel sera l’impact de ce nouvel investissement sur vos revenus fonciers et votre revenu global ?

1 - Déterminez le montant total de vos revenus fonciers

  Revenus fonciers
Bien locatif n°1 10 000 €
Bien locatif n°2 9 000 €
Bien locatif n°3 15 000 €
Total 34 000 €

2 - Déduisez les intérêts d’emprunt en priorité, puis les autres charges, travaux et taxes pour déterminer le montant total de votre déficit foncier

  Solde intermédiaire
Total revenu locatif (bien 1, 2 et 3) 34 000 €
Imputation des intérêts - 1 500 €
Sous total 32 500 €
Imputation des charges - 6 700 €
Sous total 25 800 €
Imputation des travaux - 45 000 €
Total déficit foncier - 19 200 €

En réalisant ces travaux de rénovation, vous générez la première année un total de 19 200 € de déficit foncier répartissable de la manière suivante :

  • déduction de 10 700 euros sur votre revenu global la première année
  • le reliquat de 19 200 - 10 700 = 8 500 euros est reportable pendant 10 ans sur vos revenus fonciers

Ainsi, la deuxième année vos revenus fonciers imposables seront de 25 800 - 8 500 = 17 300 euros au lieu de 25 800 euros.

Quels sont les investisseurs concernés par les déficits fonciers ?

Les déficits fonciers sont l’une des nombreuses sources de défiscalisation relative à un investissement locatif. En effet, vous pouvez aussi envisager des investissements en Pinel, Censi Bouvard, Malraux qui vous proposent des réductions ou des crédits d’impôt.

Les crédits d’impôts et réductions sont des avantages fiscaux qui viennent s’imputer sur vos impôts à payer et non sur vos revenus imposables (attention à ne pas confondre). Parfois, il faudra choisir entre réduction fiscale et déduction fiscale (déficit foncier).

Alors à qui s’adressent les déficits fonciers ?

En ce qu’ils viennent se déduire du revenu global, les déficits fonciers sont particulièrement efficaces si votre taux d’imposition et vos revenus locatifs sont suffisamment élevés.

Ainsi, l’avantage fiscal des déficits fonciers n’est pas négligeable d’autant s’ils ont pour cause la réalisation de travaux de rénovation, puisqu’il en découle une valorisation du bien immobilier sous-jacent. 

L’autre point positif du déficit foncier réside dans sa non-prise en compte au titre du plafonnement des niches fiscales (10 000 euros) contrairement aux investissements Pinel et autres niches fiscales de l’investissement immobilier !

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  • Comment calculer un déficit foncier ?

    Au sens fiscal, le déficit foncier se calcule en faisant la différence entre les revenus fonciers et les charges déductibles relatives à l’exploitation des biens générant des revenus fonciers (locations nues). Pour parler de déficit foncier, il faudra que cette différence donne un résultat négatif.

  • Quelle est la part du déficit foncier imputable sur le revenu global ?

    Le déficit foncier est imputable sur les autres revenus du foyer fiscal dans la limite de 10 700 euros. En cas de surplus, vous pouvez l’imputer pendant 10 ans sur vos autres revenus fonciers jusqu’à épuisement du déficit.

  • Peut-on cumuler déficit foncier et loi Pinel ?

    Il n’est fiscalement pas possible de bénéficier d’une réduction d’impôt et d’un déficit foncier pour une même charge.

    Cependant, la base de calcul de la réduction Pinel est plafonnée à 300 000 euros. Les travaux venant en surplus de ce plafond peuvent donc être imputés au titre des déficits fonciers puisqu’il n’entre pas dans le calcul de la réduction Pinel.